vendredi 25 octobre 2013

Restructurations : les propositions-surprise du CEMAA

On le sait, pour rendre les postes que le projet de LPM lui impose de rendre, l'armée de l'air n'a pas le
choix : il faut fermer des plateformes et remettre à plat l'organisation et le plan de stationnement des aéronefs. Néanmoins, rien n'est encore figé dans le marbre, comme le laisse clairement entendre la dernière audition du général Denis Mercier, CEMAA. Le patron de l'armée de l'air y rappelle les mesures annoncées début octobre, dévoilant aussi que Saintes deviendra (comme Châteaudun) un simple "élément air", ce qui permet de gagner sur le format global du site.
Le général Mercier rappelle aussi une évidence, pas toujours bien maîtrisée par ceux qui en parlent et qui permet de comprendre la mesure du casse-tête : "La manœuvre RH est très complexe car lorsque nous supprimons environ 250 postes sur la plateforme aéronautique de Dijon, les personnes existent toujours, il faut gérer la déflation sur l’ensemble des compétences de l’armée de l’air. Par ailleurs nous devons trouver pour chaque aviateur restructuré une solution personnalisée, quel que soit son statut, de carrière ou sous contrat ! C’est de plus en plus difficile car, afin de maintenir des compétences là où elles sont nécessaires, on pourra moins, comme par le passé, tenir compte de toutes les volontés de chacun. Il faudra à l’avenir affecter les personnes qui disposent de certaines qualifications là où on en a vraiment besoin. Mon absence de maîtrise sur les effectifs qui se situent en dehors du budget opérationnel de programme (BOP) Air renforce la difficulté de l’exercice."
 Le CEMAA s'est aussi prononcé, à son niveau, sur le devenir de la base de Luxeuil, qui aura perdu 900 postes en dix ans, n'affichant plus qu'une activité aéronautique particulièrement modeste : la BA 116 "restera ouverte" assure-t-il en avouant réfléchir "aux moyens de densifier cette implantation, pour optimiser l'usage de ses infrastrctures dans un cadre interarmées".
Voyons, qu'a-t-on sur place, une piste, des hangars ? Un peu loin du sel, Luxeuil ne peut pas intéresser la marine, mais présente de quoi accueillir un régiment VBCI (comme sur l'ancienne base aérienne de Colmar) ou peut-être des... hélicoptères, mais comme il y en a de moins en moins dans les armées et qu'à Luxeuil, la météo n'est pas celle du Luc, on ne voit pas encore très bien qui pourrait aller ce presser sur ce site. Peut-être un site d'écoute électronique ?
Mais la réalité est là : l'armée de l'air cherche clairement à trouver des solutions intelligentes pour limiter l'impact de la disette. Quitte, peut-être, à occuper l'ancienne caserne du REC, à Orange, pour y mettre un pôle de formation, comme des signaux convergents le laissent entendre. Ou à ce que la logique prévale, pour le regroupement de Caracal à Cazaux, dont le CEMAA rappelle les atouts : proximité du 13e RDP, champ de tir, nombreux espaces d'entraînement, et installations flambant neuves. En outre, affirme-t-il, le savoir-faire de l'escadron d'hélicoptères Pyrénées est "sous-utilisé" (1), tout comme ceux des trois CPA : "nous réfléchissons à l'évolution de l'organisation et de l'emploi de nos trois commandos parachutistes de l'air afin de les impliquer davantage aux opérations spéciales".
Pour l'organisation, cela me semble assez facile, la marine a montré la voie, en colocalisant l'école de formation, les unités et l'état-major, permettant ainsi de vrais effets de synergies (2), tout en restant dans un format contenu (500 marins). Un exemple que l'armée de l'air serait bien inspirée de suivre : il reste beaucoup de place à Cazaux.


(1) rappelons que les chefs d'état-majors d'armée ne sont responsable que de la gestion de l'organique, et ne choisissent pas les missions de leurs moyens en opex. Pour l'illustrer, on peut rappeler, par exemple, le retard d'engagement de la chasse au Mali, le 11 janvier 2013, qui n'est vraisemblablement pas le choix de l'armée de l'air. Cet épisode est largement développé dans "Commandos français, les missions des forces spéciales" que je viens de sortir chez Altipresse.
(2) Le fait d'avoir l'école de formation et l'état-major sur place permet aux commandos des allers-retours entre les unités opérationnelles et structures de commandement et d'instruction, donc une respiration individuelle et familiale, c'est un levier évident pour fidéliser les personnels, et une des explications de la solidité du modèle de la marine.